A neuf heures une lundi matin le téléphone sonne chez les Belleau.
Mireille qui par hasard se trouve près du téléphone décroche.
Allô.
Allô? L'armée du salut?
Ah, non, madame, ce n'est pas l'armée du salut. Vous vous êtes trompée du numéro. C'est la caserne des pompiers, ici. Vous avez un faux numéro.
Ah! Je me suis trompée du numéro?
Oui, vous vous êtes trompée du numéro, madame.
Oh, excusez-moi, mademoiselle, excusez-moi!
Il n'y a pas de mal, madame, ce n'est pas grave. Vous voulez l'armée du salut?
Oui, l'armée du salut.
Attendez, je vais vérifier le numéro. Ne quittez pas!
Allô? Madame? C'est le 43 87 41 19.
A, vous êtes bien aimable, mademoiselle. Je vous remercie beaucoup, mademoiselle!
De rien! Il n'y a pas de quoi! Je vous en prie. C'est la moindre des choses. Au revoir, madame!
Mireille raccroche.
A neuf heures trois le téléphone sonne de nouveau.
Mireille décroche aussi.
Allô, c'est l'armée du salut, major Barbara à l'appareil.
Allô, est-ce que je pourrais parler à mademoiselle Mireille Belleau, s'il vous plaît?
C'est vous, Robert? Comment allez-vous?
Ca va. Merci. Vous aussi? Je... je vous téléphone parce que l'autre soir, le vendredi vous m'avez dit de vous téléphoner ce matin. Je... he... je voulais vous demander quand je pourrais vous revoir. Enfin si vous voulez.
Ah, c’est gentil, mais pas aujourd'hui. Aujourd’hui je dois aller à Chartres.
Je croyais que vous étiez à Chartres l'autre jour, jeudi.
Non, jeudi je n'ai pas pu y aller. Aujourd'hui je dois absolument y aller.
Moi aussi je devrais aller à Chartres. La cathédrale... Est-ce que je ne pourrais pas y aller avec vous?
Oh, si vous y tenez. Mais, vous savez, moi, je ne vais pas à Chartres pour voir la cathédrale. J’y vais pour aller au musée et pour parler au conservateur.
Ah, bon, ce n’est pas un problème. Je pourrai visiter la cathédrale pendant que vous verriez ce monsieur.
D’abord le conservateur n’est pas un monsieur, c’est une dame. Et je trouve que vous arranger bien facilement les choses.
Oh, vous savez s’il n’y avait que des difficultés comme ça, la vie serait facile, non? Et comment comptez-vous aller à la Chartres? En auto ? Par la route ?
Non, je n’ai pas de voiture !
Je pourrais en louer une, si vous voulez...
Ah non, c’est trop cher. Et puis avec une voiture de location j’aurai trop peur de tomber en panne.
Si vous ne voulez pas louer une voiture. Prenons l’autocar ! Ca, ça ne doit pas être trop cher.
Ah non, l’autocar – ce n’est pas cher. Mais ce n’est pas commode. Ca ne va pas vite.
Alors, Allons-y en avion, ça, au moins, c’est rapide.
Mais, non, voyons ! On peut pas aller à Chartres en avion ! C’est tout près ! Chartres est trop près de Paris !
Et bien, alors, si c’est tout près, Allons-y à pieds ? J’aime bien marcher.
Tout de même, ce n’est pas loin, mais ce n’est pas si près que ça !
Et bien, alors, Allons-y à bicyclette ou à cheval !
A cheval – ce serait bien, mais je n’ai pas le temps.
Alors, si vous êtes pressée, Allons-y en motocyclette. Rom-rom !!! J’adore la moto ! ???
Mmm... Je ne sais pas. C’est un peu dangereux. Et de toute façon je n’ai pas de casque. Et le casque est obligatoire au moto.
Alors, je suppose qu’on peut pas y aller en bateau ? Alors, qu’est-ce qu’il reste ? Hélicoptère ? Aéroglisseur ?
Il y a bien un aéroglisseur entre Boulogne et Louvres, mais pas entre Paris et Chartres. Il n’y pas de service d’hélicoptère non plus. Il y a bien les hélicoptères dans la gendarmerie, mais ils ne prennent de passagers. Sauf pour les transporter à l’hôpital.
Alors vous allez y aller en train ?
Bien sûr ! Vous avez deviné ! Le train, vous savez, c’est encore ce qu’il y a de mieux.
Chic ! Je vais pouvoir prendre le TGV.
Mais non, voyons ! Il n’y pas de TGV entre Paris et Chartres ! Le TGV va trop vite ! C’est trop près. Avec le TGV on sera arrivé avant d’être parti.
TGV ou pas TGV, si vous vouliez bien, j’irai ???? avec vous.
Eh bien, entendu. Rendez-vous à 11 heures, à la gare Montparnasse, côté banlieue.
Comment est-ce qu’on va à la gare Montparnasse ?
Mais c’est facile ! Vous n’avez qu’à prendre le métro !
Vous croyez ?
Oui, bien sûr ! Pourquoi pas ?
L’autre jour j’ai voulu prendre le métro. Je me suis complètement perdu.
Sans blague ? C’est pas possible ! On peut pas se perdre dans le métro !
Mouais si !
Eh bien, écoutez, c’est pas difficile. Vous prenez le métro à la station Odéon ou Saint-Michel, vous prenez la ligne Porte de Clignancourt – Porte d’Orléans, direction Porte d’Orléans. Et attention vous ne prenez pas le métro qui va à la Porte de Clignancourt ! Vous prenez celui qui en vient et qui va à la Porte d’Orléans. Et vous descendez à Montparnasse-Bienvenüe. C’est simple, c’est direct, il n’y pas de changements. Vous ne pouvez pas vous tromper.
Et vous achèterez un carnet de tickets – c’est moins cher.
Un carnet, s’il vous plaît !
Merci !
Dans le métro Robert – l’homme qui se perd partout ! Face à lui quatre portillons, deux couloirs, cent kilomètres de tunnels, le plus grand réseau souterrain du monde. Une fois de plus Robert va faire la preuve de son exception facilité à se perdre. Robert – l’homme qui se perd partout ! Enfin presque partout. Quand Robert arrive à la gare Montparnasse, Mireille est déjà là, elle l’attend en lisant le journal.
Salut !
Excusez-moi, je suis un peu en retard. J’ai failli me perdre. Où est le guichet ?
Là-bas !
Je prends 2 aller-retour de première, n’est-ce pas ?
Non, un seul billet – j’ai déjà acheté mon billet. Et moi je voyage en seconde, alors, si vous aviez l’intention par hasard de voyager dans le même wagon que moi, vous feriez mieux d’acheter un billet de seconde.
D’accord !
Un aller-retour de seconde pour Chartres, s’il vous plaît.
C’est par où ?
C’est par là !
Par là ?
Eh ! Il faut compostez votre billet !
Ah, Versailles ! Le château, le Grand Trianon dans les grilles, la galerie des Glaces, le parc, les parterres dessinés par le Nôtre, les bassins, le Hameau de Marie-Antoinette. Je devrais aller voir Versailles un de ces jours. Ce serait bien si je pouvais visiter ça avec un spécialiste de l’histoire de l’art comme vous.
Je voulais vous dire – ne devrions pas nous vouvoyer comme ça.
Nous vouvoyer ?
Oui, nous vouvoyer, nous dire « vous » !
Vous savez, les gens se tutoie très vite. Je ne voulais pas vous tutoyer devant les Courtois l’autre jour, parce qu’ils sont un peu vieux jeu. Mais j’ai l’habitude de tutoyer tous mes copains. Alors, on peut se tutoyer ?
Oui.
Ou à propos, mes parents aimeraient bien faire votre connaissance. Ils aimeraient vous avoir à dîner un de ces soirs. Les Courtois leur ont beaucoup parlé de vous. Jeudi soir, ça vous irez ? On pourrait peut-être aller au cinéma, si vous voulez, après ?
Oui, si vous voulez... Je croyais qu’on se tutoyer...
11 heures 43. Et bien, dis donc, le train est arrivé à l'heure pile.
Évidemment! Les trains sont toujours à l'heure en France. Ils sont très ponctuels. Ils partent exactement à l'heure, ils arrivent exactement à l'heure.
Toujours?
Oh, oui, toujours! Enfin presque toujours.
Ah, tu as faim? Bon, allons manger quelque chose rapidement dans un café en face. Tiens, là-bas!
Bonjour, monsieur, dame!
Bonjour!
Bonjour, madame!
Moi, je prendrai juste une assiette de crudité.
Oui!
Pour moi une assiette de charcuterie, s'il vous plaît, et un petit pichet de vin... rouge!
Merci!
Et une carafe d'eau, s'il vous plaît!
Oui, mademoiselle, tout de suite!
Il est sympa.
L'assiette de crudité. L'assiette de charcuterie. Le pichet de vin rouge. Voilà! Bon appétit!
Et une carafe d'eau, s'il vous plaît!
Oui, mademoiselle, tout de suite!
Tu veux du vin?
Non, merci!
Voilà!
Merci!
Tiens!
Merci!
Ton musée est près de la cathédrale?
Juste à côté.
On va prendre un taxi!
Tu plaisantes? C'est tout près! On y va à pied. C'est à 10 minutes au plus.
Au moment quand il vont traverser la promenade des Charbonniers ils assistent à un accident. Un vélomoteur qui sort trop vite d'une rue latérale heurte une camionnette qui heureusement roule très lentement. Cycliste est procheté????? par-dessus du capot sur le trottoir d'en face, juste devant une pharmacie.
C'est rien!
Vous ne vous êtes pas fait mal?
Non, non, ça va! Ah bon, je suis bien tombé!
Ca va, merci!
C'est très beau!
Robert et Mireille sont maintenant devant la cathédrale. Ils admirent les portails.
Eh bien, tous les apôtres!
Ils ont de belles têtes!
Et là, c'est le Christ!
Tu vois, avec les pieds posés là, sur des lions?
Tu as vu tous ces monstres?
Oui, ça, c'est l'enfer!
De ce côté – c'est l'enfer, et de l'autre côté – c'est le paradis.
Entrons à l'intérieur de la cathédrale, tu veux?
Tu ne vas pas au musée?
Si, tout à l'heure. J'ai le temps! Il n'est même pas 2 heures.
Il y a très peu de monde dans la cathédrale. Quelqu'un joue du Bach à l'orgue. La lumière qui traverse les vitraux de la rosace projette des taches multicolores sur les dalles et sur les énormes piliers. Un rayon illumine un instant les cheveux blonds de Mireille. Robert est très ému.
Bon, je vais y aller. Voyons, il est 2 heures. Je te retrouve ici dans une heure. A 3 heures pile, d'accord?
D'accord!
A tout à l'heure!
Robert admire le portail royal, les statues-colonnes des rois et des reines avec leurs longs cheveux. Puis il va regarder les magasins qui vendent des cartes postales, des cuivres, des guides, des dentelles, toutes sortes de bibelots. Il se demande s'il ne pourrait pas acheter un petit cadeau pour Mireille. Né, il n'ose pas. Juste à ce moment Robert croit voir Mireille qui sort du musée. Elle se trouve tout près d'un très beau jeune homme blond qui a l'air suédois. Elle remarque tout de suite sa silhouette sportive et ses jambes musclées, il porte un short bleu extrêmement court. Elle trouve son visage agréable et lui sourit. Il lui rend son sourire et ils disparaissent derrière l'apside. Quelques instants plus tard Mireille arrive comme une fleur devant le portail royal.
Tu vois – je suis ponctuelle, comme les trains!
Je suis même en avance – il n'est que 2 heures 59.
A ce moment Robert remarque que le beau suédois démarre bruyamment dans une alpine rouge.
Dans le train de Chartres au retour Robert n’est pas de très bonne humeur.
Il y a beaucoup de monde dans ton train. Regarde-moi ça ! Tous les compartiments sont bondés. Non, mais c’est pas vrai ! Toutes les places sont prises ! Regarde-moi ça ! Les gens sont serrés comme des sardines. Si j’avais su je serais resté chez moi ! Ou j’aurais loué une voiture !
Ouais ! Ou tu serais venu à pied. Ne t’en fais pas ! On va pas rester debout dans le couloir ! Allons voir plus loin ! On trouvera bien une place. Ah, tiens, qu’est-ce que je te disais – ce compartiment est vide. Enfin presque vide.
Il y a dans un coin un passager caché derrière un journal. L’homme en noir, bizarre...
Je ne comprends vraiment pas comment tu peux préférer le train à la voiture.
J’apprécie la SNCF.
La quoi ?
La SNCF – la société nationale des chemins de fer français. Remarque que j’ai rien contre les voitures ! Au contraire – j’aimerais bien avoir une petite voiture... décapotable ou au moins avec un toit ouvrant. Et un grand coffre pour mettre mes valises avec toutes mes robes dedans ! Et un mini-vélo ! Une petite 205 peugeot.
Tu ne préférerais pas une petite alpine-renault par hasard ?
Oh, ça, bien sûr ! Ca, c’est de la bagnole ! La vraie voiture de sport ! Nerveuse, rapide, des reprises foudroyantes ! Et comme tenue de route – c’est formidable ! Ca se conduit avec le petit doigt ! Et ça marche – tu peux faire du 140 à l’heure toute une journée sans chauffer ! Et comme freinage impeccable ! 4 freins à disques à CST ???? Et ça ne consomme presque rien ! 6 litres et demie aux 100 !
Et dis donc – tu as l’air de t’y connaître.
Bah, forcément – c’est de naissance ! Mon père est chez Renault ! Mais de toute façon tout ça ce n’est pas pour moi ! Remarque – d’une certaine façon j’aime autant faire de l’auto-stop. Tous les avantages de la voiture sans les inconvénients !
Tu fais de l’auto-stop ?
Oui, ça m’est arrivé. Une fois je suis allée de Paris à Genève en stop. J’ai mis 8 heures. Ce n’est pas mal ?
Mais... ce n’est pas dangereux ? Tu n’as pas peur ?
Bon, non ! Puis c’est ça – le charme !
Ca y est ! On est arrivé !
Mireille et Robert descendent du train et sortent de la gare Montparnasse.
Si on allait dîner sur un bateau-mouche, ce serait bien ! Je t’invite. Ca va être bien, non ? Avec tous les monuments illuminés ?
Oh, penses-tu ! C’est un truc pour les touristes américains, ça ! T’es pas un touriste américain, toi ? De toute façon ce soir je suis pas libre. Je dois aller chez une amie boulevard Saint-Germain. Et l’autobus – c’est par là !
Comment ? Ton chauffeur ne t’attend pas avec l’alpine ?
Mon chauffeur ? Ah non, pas ce soir ! Ce soir je lui ai donné un congé! Oh, tiens, voilà mon bus qui arrive ! A jeudi soir ! N’oublies pas que tu dînes ????? à la maison vers 7 heures et demie – 8 heures.
Est-ce que je ne pourrai pas te voir demain ?
Non ! Impossible ! Demain je vais en province. Au revoir !
Salut !
Et l’autobus démarre.
Une amie ? Hein ! Ca ne m’étonnerait pas si cette amie avait un petit air suédois et de belles jambes musclées dans un petit short bleu ciel !
Robert serait-il jaloux ?
Taxi !
Il arrête un taxi.
Boulevard Saint-Germain, s’il vous plaît !
Où est-ce que je vous arrête ?
Je ne sais pas !
Ah, moi non plus !
Au café de Flore ?
Oui, c’est ça !
Pas de Mireille ni de suédois au Flore, ni au Deux Magots, ni chez Lipp, ni au Drugstore, ni à la Rhumerie Martiniquaise, ni chez Vagenende, ni au Procop, ni au Tabou, ni au Riverside, ni au Whisky à Gogo.
Où peut-elle bien être ?
Où peut-elle bien être ?
Ca, je ne sais pas !
Le lendemain matin Robert n’a pas l’air en forme. On dirait qu’il a mal dormi cette nuit. Pourquoi ?
Je sais pas !
Bonjour, monsieur ! Vous avez bien dormi ?
Mm, oui ! Enfin... pas trop... Dites-moi, Provins, vous connaissez ?
Bien sûr !
Vous pouvez me dire où c’est ?
Eh bien, c’est vers l’est, euh... enfin le sud... oui, c’est ça, le sud-est de Paris. Oh, ce n’est pas très loin.
C’est du côté de Chartres ?
Ah, non ! Chartres, c’est vers le sud-ouest. Provins, c’est au-dessus de Fontainebleau. Vous connaissez ?
Bon, merci ! Vous savez où je pourrais louer une voiture ?
Ah oui ! Avisse ????, Herz, Europe-car, Matéis ???? Pourquoi ? Vous voulez louer une voiture ?
Oui !
Allez au garage Chelles ???? en bas du boulevard Raspail, si vous voulez. C’est un ami. Dites-lui que vous venez de ma part.
Merci !
Bonjour, monsieur !
Bonjour !
Je viens de la part du propriétaire du l’homme latin. Je voudrais louer une voiture pour la journée.
Oui. Qu’est-ce que vous voulez ? Une grosse voiture ? Une petite voiture ? Changement de vitesses automatique ou manuel ? Tenez j’ai là une Renault 11 toute neuve ! Avec 5 vitesses synchronisées au plancher. J’ai aussi une CX avec suspension hydraulique – c’est très confortable.
Oh ça, ça m’est égal. Donnez-moi la moins cher. Cette R5 là-bas par exemple. Il paraît que les R5 sont les moins cher, c’est vrai ?
Je regrette, mais elle n’est pas à louer. Je ne peux pas vous la donner. Si vous voulez je peux vous donner une Peugeot 205.
C’est ce que vous avez de moins cher ?
Oui !
Bon, c’est combien pour la journée ?
450 francs !
D’accord ! Je la prends.
Si vous voulez ????? bien me donner votre permis de conduire ? Ah un permis américain !
Quelques minutes plus tard Robert est au volant de la Peugeot.
Pour aller à Fontainebleau, c’est par là ?
Oui, remontez le boulevard Raspail. Là, devant vous. Vous connaissez bien Paris ?
Hein, non, pas trop...
Tenez, je vais vous montrer. Vous êtes ici. Vous remontez le boulevard Raspail jusqu’à Denfert Rochereau. Vous verrez, c’est une place avec un lion. Vous obliquez à droite pour prendre l’avenue du Général Leclerc. Vous la suivez jusqu’à la porte d’Orléans. Et là, vous prenez le boulevard périphérique sur la gauche. Vous n’aurez qu’à suivre les indication pour l’autoroute A6 direction Lyon. Il y a des panneaux partout. Il n’y a pas moyen de se tromper. Vous ne pouvez pas vous perdre.
Très bien. Merci ! Au revoir !
Au revoir ! Bonne route !
Pendant ce temps-là Mireille téléphone à son oncle Guillaume pour lui emprunter une voiture.
Allô, tonton ? C’est moi, Mireille ! Dis-moi, je dois aller à Provins voir mon amie Colette. Tu sais Colette Besson ? Est-ce que tu pourrais me prêter une voiture ?
Oui, ma petite Mireille ! Bien sûr ! Prends celle que tu voudras – ça m’est égal.
La CX ?
Entendu ! Prends-la au garage quand tu voudras. Je vais leur téléphoner pour les prévenir.
Je te remercie. Au revoir !
Pendant ce temps-là Robert remonte le boulevard Raspail. Il arrive à la place Denfert Rochereau, la place avec le lion. « Obliquer à droite, prendre l’avenue du Général Leclerc, la suivre, la suivre, jusqu’à la Porte d’Orléans. Ca doit être ici. Maintenant prendre la périphérique sur la gauche. L’autoroute A6 en direction de Lyon. Il y a des panneaux partout. Il n’y a pas moyen de se tromper.
3 heures plus tard Robert est complètement perdu à 300 kilomètres de Paris en pleine Bourgogne. Il demande son chemin.
Excusez-moi, monsieur ! La route de Paris, c’est bien par là ?
Ah non, vous vous êtes trompé, jeune homme. La route de Paris, c’est à droite là-bas.
Là, par là, c’est ma conte. Là, vous êtes perdu.
Voilà ce qui s’est passé. A Fontainebleau il a voulu sortir de l’autoroute pour remonter vers Provins. Juste au moment où il sortait de l’échangeur il a vu une alpine avec une blonde dedans qui s’engageait sur l’autoroute en direction de Lyon. Robert a fait aussitôt demi-tour et s’est lancé à sa poursuite. Robert fonce le pied au plancher mais l’alpine refuse de se laisser dépasser. Juste avant Beaune l’alpine s’arrête pour prendre de l’essence.
Le plein de super, s’il vous plaît !
La blonde descends de voiture et se dirige vers les toilettes. Ce n’est pas Mireille. Écœuré Robert sort de l’autoroute et va se perdre dans les vignobles bourguignons. Aloxe-corton. Nuits St. Georges. Vosne Romanée. Vougeot. Chambolle-Musigny. Gevrey-Chambertin. Fixin.
Robert est perdu en pleine Bourgogne. Il fait une étude systématique des grands crus.
???? Il a du nez !
Et pendant ce temps-là où est Mireille ?
Ah ça, je ne sais pas !
Elle va chercher la voiture de tonton Guillaume.
Elle s’amène au garage comme une fleur, met le contact, la voiture refuse de démarrer.
Je crois qu’elle est morte. Elle peut pas démarrer.
?????, ma petite demoiselle. Les accus sont à plat, mais ne vous en faites pas ! Dans la vie faut pas s’en faire ! Moi, je m’en fais pas.
Oui, elle est morte. Les accus sont à plat, mais ne vous faites pas de bile, je vais arranger ça.
Je vais vous prêter une... une autre voiture. Voiture de location qu’il a montré. Elle n’est pas très propre, mais cela vous dépannera ????
Celle-là démarre au quart de tour.
Oh, ça va, merci !
Au premier feu rouge elle appuie sur le frein – aucun effet. Elle brûle le feu rouge et continue comme une fleur. Heureusement il y avait un frein à main. Elle s’arrête devant un garage.
Je n’ai plus de frein. J’ai été obligé de brûler le feu rouge.
Voyons ça ! Vous ouvrez votre capot ?
C’est bien ce que je pensais – vous n’avez plus une goutte de fluide ! Je vais arranger ça !
Voilà ! Essayez votre frein ! Là, pour voir. Pompez ! Pompez ! Ca marche ?
Oui, ça va!
Et bien, voilà, c’est arrangé, c’était pas bien grave.
Je vous dois combien ?
Pour vous mademoiselle ça ne sera rien. Je ne vais pas vous faire payer pour cela !
Si, enfin ! Pour le fluide au moins !
Ce n’est rien ! Allez ! Au revoir, mademoiselle ! Et soyez prudente !
A la sortie de Paris, Porte des Lilas, au milieu d’un embouteillage le moteur cale, impossible de le démarrer. Heureusement 2 jeunes gens qui faisaient de l’auto-stop la poussent jusqu’à une station-service.
Vous êtes en panne ?
Oui, mais je ne sais pas ce que c’est. Le moteur s’est arrêté.
Vous avez de l’essence ?
Ah non !
Eh bien, ça doit être ça ! Bon, je vous fais le plein ?
Oui, s’il vous plaît !
L’essence ou le super ?
Bah, je ne sais pas ! Bon, le super !
Je vérifie les niveaux ?
Oui, je crois qu’il vaut mieux !
C’est bon !
Merci !
Et Mireille repart sans les 2 auto-stoppeurs qu’une mercedez suisse vient de ramasser.
A quelques kilomètres de Provins le pneu avant gauche crève à la sortie d’un virage. Et Mireille manque se retrouver dans le fossé.
Elle se prépare à changer la roue, mais la roue de secours est à plat.
Un cycliste arrive.
Vous êtes en panne ?
J’ai crevé !
Je vais vous aider ?
Ce n’est pas la peine ! Ma roue de secours est à plat !
Ne vous en faites pas ! Je vais vous envoyer un dépanneur !
C’est gentil ! Merci !
Mireille attend en effeuillant des marguerites sur la bord de la route. Il m’aime un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout ! Il va arriver dans une heure, dans une demi-heure, dans un quart d’heure, dans 5 minutes, tout de suite, pas du tout !
Le dépanneur remorque la voiture jusqu’au garage. On répare les 2 pneus. Et Mireille repart.
Elle n’a pas fait 100 mètres qu’il se met à pleuvoir. Évidemment les essuies-glace ne marchent pas !
Et elle est obligé de conduire sous la pluie en se penchant à la portière.
Elle arrive trempée chez les Besson.
Qu’est-ce qui t’arrive ? T’es en retard ! T’es toute trempée ?
Ne m’en parle pas !
Entre !
Non, attend je vais d’abord essayer mes phares. Ca marche ?
Non ! Essaie encore !
Non !
Ils marchent pas ! Je m’en doutais ! J’en étais sûre ! Bon, écoute ! Je repars pour être sûre d’arriver avant la nuit !
Juste comme elle arrive Porte des Lilas un cycliste dérape devant elle. Elle donne un coup de volant pour l’éviter puis elle met son clignotant. Mais trop tard ! Elle a accroché une autre voiture !
Bilan – une aile enfoncée et une éraflure sur la portière de droite. Ah quelle journée ! Vive le train ! Mais vous pouvez pas faire attention, non ?
Vers 23 heures Mireille téléphone au Homme Latin.
Allô ? Homme Latin ? Monsieur Taylor, s’il vous plaît !
Sa chambre ne répond pas!
Vous êtes sûre ? Sa clé est là ?
Oui, madame ! Sa clé est là, il n’est pas rentré.
Bon, je vous remercie ! Au revoir !
11 heures passé, mais où peut-il bien être ?
Ah, je sais pas !
Ou est Robert ? Il est en Bourgogne ! Il continue en chantant son étude des grands vins de la région.
Je suis fière d’être bourguignon !
Jeudi soir Robert va dîner chez les Belleau. Il est un peu perdu.
Ne le suivez pas ! Il est perdu !
Il arrête un passant.
Pardon, monsieur! Excusez-moi! Je suis un peu perdu. La rue de Vaugirard, s'il vous plaît? C'est par ici? C'est par là? C'est de quel côté?
Non, c'est par là. C'est tout près. Vous y êtes presque.
Merci! Au revoir !
Je vous en prie!
En effet peu après Robert débouche dans la rue de Vaugirard.
52. Ca doit être par là. 54? Non, alors, c'est par ici. 46. 28. 12. Mais où est-ce que c’est, le 18 ? Il n'y a pas de 18! Ca n'existe pas ! Ca alors! Est-ce que Mireille m'aurait donné un faux numéro? Ah non, voilà, 18 – c'est ici.
C'est un immeuble assez ancien, à 5 étages avec un 6-ème étage sous le toit. Près de la porte d'entrée il y a un bouton et un petit écriteau qui dit «Sonnez et entrez!» Robert appuie sur le bouton, pousse la porte et entre. La lumière s'éteint aussitôt. Le vestibule est sombre et sent le pipi de chat. Robert cherche une liste des locataires – il n'y en a pas. Il se dit qu'il aurait dû demander à Mireille à quel étage elle habitait. Cela aurait été plus simple. Sur la porte vitrée de la loge de la concierge il y a un écriteau qui dit «Frappez fort!». Robert frappe. Aucun effet. Il frappe plus fort.
Oui, qu'est-ce que c'est? Entrez!
Belleau, s'il vous plaît?
Georgette Belleau? Au 5-ème, au fond de la cour.
Non. Monsieur et madame Belleaus.
Ah, eux, ils habitent au 4ème, droite. Prenez l'escalier en face. L'ascenseur marche pas.
L'ascenseur est petit et paraît fragile. Même s'il avait marché Robert aurait sans doute préféré monter à pied. Au pied de l'escalier au rez-de-chaussée un petit écriteau ordonne: «Essuyez-vous les pieds!» Robert obéit – il s'essuie les pieds. Arrivé sur le palier du 4ème il remarque près de la porte de droite une petite carte de visite qui dit: «Monsieur François Belleau ingénieur ecam». Il donne un coup de sonnette discret. Une jeune fille souriante ouvre. Ce n’est pas Mireille.
Ah, excusez-moi, j’ai dû me tromper, je cherchais les Belleau.
C’est bien ici. Vous ne vous êtes pas trompé. Vous devez être monsieur Taylor, sans doute ? Je suis Colette Besson, une amie de Mireille. Entrez donc. Par ici.
Dans l’entrée Robert remarque un grand vase avec une demie douzaine de roses qui se reflètent dans un miroir ce qui complètent heureusement la douzaine.
C’est l’américain !
Voyons, Marie-Laure ! Vous ????? être poli ! Qu’est-ce que c’est que ces manières ?
C’est mon cowboy adoré ! Salut, cowboy ! Où est-ce que tu as laissé ton cheval ?
Je l’ai attaché dans le jardin en bas.
Tu as bien fait ! Parce qu’ici on a pas de place. Et tu sais on n’as pas trop l’habitude de recevoir des cowboys avec des chevaux !
Si vous voulez bien vous asseoir un instant au salon, je vais prévenir madame Belleau.
La pièce dans laquelle se trouve Robert est une assez grande sale de séjour qui communique avec la sale à manger où la table est déjà mise pour 7 couverts. Divan, quelques chaises, des fauteuils Louis XVI et seconde empire, un piano, au mur 2 ou 3 tableaux modernes... Madame Belleau entre.
Monsieur Taylor, je suis enchantée de faire votre connaissance !
Madame !
Les Courtois nous ont beaucoup parlé de vous.
...suivie de monsieur Belleau.
Monsieur Taylor, très heureux de vous connaître !
Monsieur !
Bonjour, Robert ! Comment vas-tu ? Je vous que tu as déjà fait la connaissance de mes parents ?
Marie-Laure, éteins la télé, s’il te plaît !
C’est bulletin météo et Robert tout étonné reconnaît le présentateur.
Mais je le connais, ce monsieur !
Vraiment ?
Pas possible !
Sans blagues ?
Tu connais ????? Depuis quand ?
Depuis tout à l’heure. Je l’ai rencontré dans la rue. J’étais un peu perdu et il m’a indiqué la rue de Vaugirard.
Il y a longtemps que vous l’avez vu ?
Non ! Tout à l’heure. Il y a une demi-heure peut-être.
Et bien il a fait vite pour aller au studio.
Il avait l’air pressé.
Et tu lui as parlé ?
Oui !
Il va peut-être parler de toi – un cowboy américain perdu dans les rues de Paris.
Marie-Laure, tu es insupportable !
Dites donc, il fait bien chaud ici. Allons un moment sur le balcon. Je vous montrerai la vue. Une vue imprenable, comme vous voyez. Avec les jardins du Luxembourg juste en face. Là, le Sénat naturellement. Là-bas, à gauche, c’est le Panthéon, et sur la droite là-bas hélas, la tour Montparnasse. 58 étages ! Une horreur ! Une catastrophe ! On la voit de tout Paris !
Et la tour Eiffel ? On ne la voit pas ?
Non. Pas d’ici. Elle est plus à droite. On la voit des pièces qui donnent sur la cour. Venez, monsieur Taylor ! Ici, c’est notre chambre. Là, la sale de bain, mais on ne peut pas voir la tour Eiffel d’ici, on peut en apercevoir le sommet des pièces qui sont de ce côté, sur la cour.
Monsieur Belleau et Robert reviennent vers le salon...
Vous avez vraiment un très bel appartement !
...en passant devant la cuisine.
Eh bien on dirait que tout le monde est à la cuisine. Nous aimons bien cet appartement. Nous habitions déjà ici quand Mireille est née. Il est très bien situé, en plein midi. Il y a beaucoup de soleil. Excusez-moi une minute – je vais préparer les apéritifs.
Robert et Mireille sont un instant seuls sur le balcon.
C’est vrai que vous avez une vue magnifique !
Oui. Eh, dis donc, je voulais te dire – mes parents ont invité un copain à moi. Hubert de Pinoche-en-bras ?????. C’est un ami d’enfance. Il vient d’une famille très aristocratique. Il est toujours en train de parler de sa famille, de ses ancêtres, de leurs chasses, de leurs chevaux, de leurs châteaux. La famille possède une grosse entreprise de construction. Mais il ne faut pas le prendre au sérieux. Parce qu’en faite il joue. Et il joue remarquablement bien son rôle de grand aristocrate. C’est un drôle de type – tu verras. Il est très amusant. Enfin moi, il m’amuse. Il m’amuse énormément.
Bah, tiens, ça doit être lui.
Jeudi soir, l’appartement des Belleau.
Ca, c’est Hubert. Je reconnais son coup de sonnette.
Madame Belleau va ouvrir.
Mes hommages, Madame !
Hubert ! Quel plaisir de vous voir !
Merci pour votre magnifique bouquet !
Mais je vous en prie, Madame ! C’est la moindre des choses ! Je sais que vous aimez les roses...
Mais vraiment vous n’auriez pas dû !
Monsieur !
Bonsoir, Hubert !
Bonsoir !
Bonsoir, Hubert !
Bonjour, toi !
Bonsoir, Colette ! Ah, bonsoir !
Ca va ?
Ca va ! Tu es fraîche comme une rose !
Mireille présente Robert à Hubert.
Bonsoir !
Tout le monde à table !
...et tout le monde se dirige vers la sale à manger.
Voyons... Monsieur Taylor à ma droite, Hubert à ma gauche, Colette, et Mireille à côté d’Hubert. Toi, Marie-Laure à côté de papa.
Tout le monde s’installe, se sert.
Un peu plus de foie gras, Monsieur Taylor ?
Je veux bien. Il est délicieux.
C’est la maman de Madame Courtois qui les fait elle-même. Marie-Laure, tiens-toi bien, s’il te plaît, ou tu va aller dans ta chambre !
Oh là là !
Pendant le repas Robet est un peu surpris de la façon de parler d’Hubert.
Soyez sûr que je partage entièrement votre opinion, cher Monsieur ! Ayez la bonté de me croire, chère Madame... Veuillez avoir l’obligeance de me passer le sel ! Cher Monsieur, sachez qu’il n’y a de bons vins qu’en France !
Est-ce qu’il y a de bons vins du côté de Provins ?
Pour les grands vins, il faut aller un petit peu plus loin. Jusqu’en Bourgogne.
Oui, Beaune, Aloxe-Corton, Nuits-Saint-Georges, Vosne-Romanée, Vougeot, Chambolle-Musigny, Gevrey-Chambertin, Fixin. Oui, oui, je connais très bien, excellent ! Excellent !
Si je comprends bien, Mademoiselle, vous habitez Provins ?
Oui, mais je viens souvent à Paris, presque tous les jours en faite.
Oui, je comprends, oui. La province, ça doit être un peu ennuyeux.
Ah non, pas du tout ! Vous savez, entre Paris et la province, moi, je crois que je préfère la province. J’aime bien Provins.
Province pour province. Moi je préfère la Province à Provins.
Ce qu’il est bête !
Marie-Laure, tais-toi, s’il te plaît ! Tiens-toi bien !
Ah, si on peut même plus rire maintenant !
Notre villa n’est pas bien grande, mais nous avons un petit jardin avec quelques pommiers au bout. C’est agréable. On se sent chez soi derrière les hais, les murs, la grille. C’est la campagne et pourtant je suis à Paris en une heure au plus.
Alors, comment ça va la construction ? Les affaires marchent ?
Ah, m’en parlez pas ! Ce sont mes oncles qui s’en occupent. Mais ils ne font rien bien de fascinant. On n’a fait pas mal de choses intéressantes, regardez, la Défense, Beaubourg, la Vilette, le Palais omnisports de Bercy, l’Opéra de la Bastille, le grand Louvre, le Forum des Halles. Mes eux, mes oncles, ils ne font que des cages à lapins, des HLM, des logements ouvriers. Vous voyez le genre. Qu’est-ce que vous voulez ! De nos jours il n’y en a plus que pour la classe ouvrière. Les ouvriers veulent avoir le tout à l’égout ???? – l’eau courante, le chauffage central, le gaz, l’électricité, tout le confort moderne. Il leur faut des lave-vaisselles, des réfrigérateurs, des aspirateurs, des téléviseurs, des vide-ordures. Mais il y a seulement 100 ans, tous ces gens-là habitaient à 10 dans une pièce sans éclairage avec l’eau à la pompe, et les cabinets au fond de la cour. Ils se débrouillaient très très bien sans baignoires ni bidets. Et ils n’étaient pas plus malheureux pour ça.
Robert ne peut s’empêcher d’intervenir.
Ils n’étaient pas plus malheureux pour ça ? Ca, c’est vous qui le dites, cher Monsieur ? Moi, je n’en suis pas si sûr ! J’aimerais vous voir, vous, logé à 10 dans un taudis infect, sans votre bain quotidien, votre douche, sans votre téléphone, votre ascenseur ou vos domestiques. Je ne suis pas sûr que vous seriez si heureux que ça ! Sachez que la classe ouvrière a les mêmes droits au confort que les descendants des oppresseurs du moyen âge !
A propos du moyen âge, est-ce que vous êtes allé voir l’exposition des manuscrits Carolingian au Petit Palais ?
Jeudi soir. On est encore à table chez les Belleau.
Colette vous reprendrez bien un peu de foie gras, vous aimez ça ? Colette n’a plus de pain. Marie-Laure, vas chercher le pain, s’il te plaît !
Oui !
Les loyers doivent être chers dans ce quartier ?
Oui ! Assez ! Mais nous, nous ne louons pas, nous sommes en copropriété. Nous avons acheté l’appartement il y a une vingtaine d’années. Chaque copropriétaire paye sa part pour le chauffage, le traitement des gardiens, l’entretien, les réparations, le nettoyage périodique de la façade. Mais au total, même avec toutes les charges c’est plus économique que de louer.
Oui, bien sûr la propriété, ça a ses avantages, mais ça devient infernal. Ma famille possédait autre fois un domaine en Vendée, un petit château en Touraine, un autre en Bourgogne avec quelques vignes, un manoir en Bretagne, un pavillon de chasse en Sologne, un masse en Provence, un chalet dans les Alpes, un gentilhommière dans le Périgord, et un cottage en Normandie. Mais maintenant c’est devenu impossible avec les impôts ! Et surtout, surtout le manque de domestiques ! Car enfin il faut bien le dire – on n’est plus servi !
Comme vous avez raison, cher ami ! Est-ce que vous voudrez bien me passer le sel, s’il vous plaît ?
Nous, nous n’avons pas de problème de domestiques. Il faut dire que nous n’avons pas de grand domaine. Mais nous avons tout de même une petite maison à la compagne qui nous sert de résidence secondaire près de Dreux. C’était une petite maison de paysans qui était en très mauvais état que nous avons achetée. Les portes ne fermaient pas, il n’y avait plus de vitres aux fenêtres. Nous avons fait toutes les réparations nous-même. Il a fallu changer presque toutes les tuiles du toit, il a fallu tout repeindre, tout retapisser. On a fait les massons, les menuisiers, les charpentiers, les plombiers, les peintres, oui ? Toute la famille a travaillé ! Ca nous a pris 2 ans pour la rendre habitable. On a fait amener l’eau, mettre l’électricité. On a transformé la grange en garage.
Mais, c’était pas le plus difficile. Il suffisait de laisser tomber un « N » et d’ajouter un « A ».
Ouais ! Arrête ! Arrête tes jeux de mots absurdes !
Qu’est-ce que c’est, le jeu de mots absurdes ?
Grange – garage. Tu as « Grange », le mot « Grange » et tu le ?????fait en « Garage ». Tu enlèves un « N » et tu ajoutes un « A ». Tu vois ?
Non !
Vas chercher ton scrabble, je vais te montrer.
Marie-Laure se lève. Madame Belleau la réprimande.
Marie-Laure, qu’est-ce que tu fais ? Veux-tu bien t’asseoir ?
Mais c’est papa qui m’a dit.
Ah bon !
Tu as « Grange », tu enlèves un « N », tu ajoutes un « A » et tu as « Garage ». Voilà !
C’est ça ? C’était pas difficile, hein !
Pendant ce temps madame Belleau continue sa conversation avec Robert.
Ca se fait beaucoup depuis quelques temps – les gens de la ville achètent de vieilles maisons de paysans, ils les modernisent et ils s’en servent comme résidence secondaire. Ils y viennent pour le week-end.
Je trouve ça triste de voir les paysans chassés de leurs vieilles maisons.
Mais on ne chasse personne. Ce sont de vieilles maisons abandonnées qui tombent en ruines la plupart du temps. En tout cas nous, notre maison, on l’a bien gagnée. On y a drôlement travaillé. Elle est bien à nous.
En ce moment on entend un coup de sonnette.
Il me semble qu’on a sonné. Marie-Laure, veux-tu bien aller voir, s’il te plaît ?
Marie-Laure se lève et sort de la pièce.
Bonjour, petite ! Est-ce que tu veux des billets de tombola ?
Ah, non-non !
Non ! Oui, c’est cela !
Un moment après elle revient.
Qu’est-ce que c’était ?
Une bonne soeur.
Qu’est-ce qu’elle voulait ?
Elle voulait me vendre des billets de loterie pour gagner un vieux prieuré du 16-ème siècle.
Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Et qu’est-ce que tu as fait ?
Je lui ai dit que ça nous intéressait pas, qu’on avait déjà une résidence secondaire et qu’avec les impôts, le manque de domestiques ça suffisait comme ça.
Marie-Laure !
Quoi ? C’est pas vrai ?
Mais tu aurais dû m’appeler, voyons ! Cette pauvre bonne soeur !
Bah ! C’était pas une vraie !
Comment ça ?
Bah non ! C’était une fausse bonne soeur !
Comment le sais-tu ?
Elle avait de la moustache !
C’est pas une raison ! Il y a sûrement des bonnes soeurs qui ont de la moustache !
Peut-être, oui ! Tante Amélie, elle a de la moustache. Mais elle, elle avait une moustache comme ça !
Bizarre !
Bizarre !
Jeudi soir. On est toujours à table chez les Belleau.
Ah ça! On peut dire qu'on y a travaillé sur cette maison de Dreux. Oh-là-là. C'est sans doute pour ça que je m'y suis tellement attachée.
On sonne de nouveau. Tout le monde s'arrête de manger et de parler. Marie-Laure va ouvrir.
Je me demande ce que ça peut bien être.
Alors, qu'est-ce que c'était?
Le frère de la bonne soeur de tout à l'heure.
Qu'est-ce que c'est que cette histoire?
Bah, oui. Il avait la même moustache qu'elle.
Et qu'est-ce qu'il voulait?
Il m'a demandé si je n'avais pas une grande soeur qui avait l'air d'une actrice de cinéma.
Et qu'est-ce que tu as dit?
Bah, cette question! Je lui ai dit que non, bien sûr!
Mais quel culot! C'était peut-être la chance de ma vie de faire du cinéma. Maintenant c'est raté! Enfin...
C'est vraiment bizarre!
C'est vrai – j'ai longtemps voulu être actrice. Je rêvais d'aller à Hollywood, jouer l'inconnue de l'Orient-Express, voyager, descendre dans des palaces. Maintenant je ne sais pas. C'est fou que je me suis attachée à notre maison de campagne. Quand j'étais petite je trouvais ridicule ce désire de beaucoup de français d'avoir une petite maison à eux, le genre « Mon rêve », « Mon repos ». Et bien, maintenant en vieillissant je commence à comprendre – avoir une petite maison bien à soi, même si elle est très modeste.
Je vois – une chaumière et un coeur.
Notre maison n'est pas vraiment une chaumière. D'abord le toit n'est pas en chaume mais en tuile.
Oh! De la tuile? Vous ne préférez pas l'ardoise? Moi je trouve???? ça tellement plus distingué.
Ah, l'ardoise! C'est très joli, mais c'est plus cher.
Et puis ça doit être joliment lourd.
C'est moins lourd que la tuile. Mais évidemment ce serait trop lourd pour vos maisons en bois.
Pourquoi dites-vous « NOS maisons en bois »? Vous n'avez pas de maisons en bois en France?
Non, très peu. Quelques chalets en montagnes. Mais à part ça on construit en dur: en pierre, en brique, en bloc de ciment. En France on aime ce qui dure.
Votre maison de campagne est en dur?
Bien sûr, c'est de la belle pierre du pays. Et les murs ont au moins 200 ou 300 ans et je compte bien qu'ils seront encore debout pour mes arrière-petits-enfants.
Tu ne peux pas avoir d'arrière-petits-enfants!
Et pourquoi ça?
Tu es trop jeune! Tu n'es même pas mariée!
J'ai lu dans le Monde qu'il y avait plus de 300 mille étudiants à Paris. Où est-ce qu'ils habitent?
Eh bien, ça dépend. Ceux qui ont la chance d'avoir leurs parents à Paris comme Mireille habitent en général chez eux, bien sûr.
Et les étrangers?
Certains habitent à la cité universitaire. La plupart des pays étrangers ont une maison à la cité. D'autres habitent à l'hôtel ou bien louent une chambre chez des particuliers.
Et il y en a qui habitent dans les familles. Ils ont leur chambre, un cabinet de toilette. Ils prennent leur repas avec la famille. Un seul repas ou pension complète.
Je croyais que les familles françaises étaient très fermées.
Oh, c'est assez vrai dans un sens. Mais il y a des gens qui prennent des étudiants étrangers chez eux, parce qu'ils ont un appartement trop grand pour eux, qu'ils ont besoin d'argent – des dames veuves, des retraités. Il y a aussi des gens qui veulent donner des amis étrangers à leurs enfants.
La famille Belleau n'aurait pas l'intention de recevoir des étrangers par hasard?
Vous savez – nous n'avons pas un grand appartement. Nous n'avons que 7 pièces. En comptant la cuisine et la salle de bain! Et je ne suis ni veuve ni retraitée. Et Mireille n'a pas besoin qu'on lui trouve des amis étrangers. Elle les collectionne! En 1 an de fac elle a réussi à connaître un Canadien, une Chilienne, une Algérienne, un Israélien, une Syrienne, un Tunisien, un Egyptien, une Italienne, une Japonaise, une Danoise, 3 Anglais, une Allemande, 2 Américains, un Roumain.
Un Hongrois, un Turc, une Grecque, un Espagnol, une Russe et un Suisse.
Et tu oublies un Suédois.
Jeudi soir, chez les Belleau. Le repas se termine enfin.
Et si nous passions au salon?
Très bonne idée!
Vous voulez une menthe, un thiole??????
Ah non!
Non merci!
Et toi, tu prendras ton infusion?
Oui, s'il te plaît!
Vous désirez peut-être un alcool, Monsieur Taylor?
Oui!
Je vais voir ce que j'ai.
C'est???? cette peinture. C'est de quelqu'un de la famille?
Oui, c'est tante Georgette.
Ah, tante Georgette!
C'est du Grand Marnier et du Cognac. Colette, vous?
Petit Grand Marnier.
Grand Marnier.
Merci!
Mireille, tu prends quelque chose?
Oui, moi aussi, un Grand Marnier.
Grand Marnier. Monsieur Taylor?
Un Grand Marnier, s'il vous plaît!
???? goûter. C'est très, très bon! Vous allez voir!
Hubert, vous?
Non, je préfère du cognac, s'il vous plaît!
Ah, du cognac!
Il est très bon, très, très bon!
Merci!
Voilà!
Merci, merci!
Merci bien!
A votre santé, moi, je ne prends rien.
Bien, à votre santé!
Qu'est-ce que tu veux? Un Grand Marnier?
Un Cognac!
Cognac! Tiens! Voilà!
Il se fait tard.
T'as vu l'heure qu'il est, Marie-Laure?
Oui!
Allez! Au lit! Tout de suite! Dis bonsoir!
Bonsoir!
Bonsoir, Marie-Laure!
Attention!
Bonsoir!
Bonsoir!
Bonsoir!
Bonsoir, ma grande!
Tu viendras me dire bonsoir?
Oui! Dépêche-toi!
Après avoir embrassé ses parents Marie-Laure est allée se coucher.
Colette est partie vers 23 heures pour retourner à Provins.
Olàlà! 11 heures. Il faut que je me sauve! Je vais rater mon train. Au revoir, Hubert!
Au revoir!
Au revoir, Robert!
Bonsoir!
Mireille! Je t'appelle.
Ok.
Bonsoir, Monsieur Belleau!
Bonsoir!
Merci beaucoup!
Monsieur et Madame Belleau se sont excusés peu après.
Je crois que nous ferions bien d'aller nous coucher.
Oui, excusez-nous! Nous avons pris l'habitude de nous coucher tôt.
Bonsoir, Madame! Mes hommages et merci! Dormez bien! J'espère que nous ne vous avons pas trop fatigués. Quel délicieux repas!
Bonsoir! Maman, tu me réveilles demain matin avant partir?
Oui, ma chérie!
Bonsoir, Hubert!
Enfin Hubert prend congé. Il est plus de 23 heures.
Bonsoir! Parce que je... je vais partir, moi aussi.
Toi aussi?
Oui, oui! Alors, on se téléphone?
Monsieur!
Bonsoir!
Robert et Mireille restent seuls.
Je suppose qu'il est trop tard pour aller au cinéma maintenant?
Oui, j'en ai peur. Mais tu veux qu'on y aille demain en matinée?
Demain matin?
Non, en matinée, l'après-midi!
Oui, si tu veux. Qu'est-ce qu'on va voir?
Pfff! Je ne sais pas. Tu vois un Pariscope par là?
Qu'est-ce que c'est?
C'est comme l'officiel des spectacles. Tiens! En voilà un!
C'est un programme des spectacles – c'est théâtre, danse, cinéma, expositions, concerts enfin tout! Ca donne tous les films qui passent à Paris, classés par quartier et par genre.
Par genre? Parce qu'en France même les films sont masculins ou féminins?
O, fais pas l'idiot! Je veux dire qu'ils sont classés par films d'aventure, westerns, comédies dramatiques, drames psychologiques, comédies musicales, érotiques, dessins animés. Il y a même un petit résumé de chaque film!
Ah bon! Qu'est-ce que tu vois d'intéressant?
Voyons ce qu'on donne cette semaine! « La cérémonie » de Nagisa Oshima, version originale. Comment est ton japonais?
Un peu rouillé. Quoi d'autres?
« Le détachement féminin rouge », version originale chinoise. « Le grand silence », yougoslave.
Sois sérieuse! Il faut que je puisse comprendre!
O, mais il y a toujours des sous-titres! Tiens! « Trash », américain. Tu crois que tu comprendrais? Oh, non, mais ça va pas. C'est interdit au moins de 18 ans!
Ecoute! Arrête! Ca suffit comme ça!
O, zut! De toute façon, c'est celui de la semaine dernière.
Et alors?
Et alors c'est plus bon! Les programmes changent toutes les semaines! On va regarder sur le Minitel. Tiens, on passe « L'amour l'après-midi » au 14 juillet Parnasse.
Ca, c'est un beau titre. Ca doit être très instructif.
O, tu sais, j'ai peur que tu sois déçu. C'est un des six comptes moraux d'Eric Rohmer.
Ca ne fait rien. Ca doit être très intéressant. Allons voir ça.
Tu veux qu'on y aille?
Oui!
D'accord. Alors, rendez-vous à 13:30 à la terrasse de la Rotonde. C'est juste à côté. Tu n'auras qu'à prendre le métro, descendre à Vavin. C'est juste en face. Tu ne peux pas te tromper.
Bon, entendu. Alors, à demain à... Comment tu dis?
A la Rotonde, Boulevard Montparnasse, métro Vavin.
D'accord! A la Rotonde, à 13:30.
Je te raccompagne. Bon, allez, bonsoir! Le bouton de la minuterie est là, à droite. Tu vois?
Où ça?
Là, la petite lumière.
Là?
Tu as 2 minutes pour descendre.
2 minutes? Pourquoi ça? Il faut que je descende en 2 minutes? Qu'est-ce que c'est que cette histoire?
Ah ben oui, quand tu appuies sur le bouton la lumière reste allumée 2 minutes et puis elle s'éteint. On a l'habitude de l'économie en France. Il faut que tu comprennes ça.
Ils sont fous, ces français!
Mais non! Nous ne sommes pas fous! Nous économisons l'énergie. Bon, dépêche-toi, ça va s'éteindre.
Bonsoir!
Bonsoir!
O, zut!
Vendredi après-midi deux heures moins le quart. Mireille attend depuis un quart d'heure à la terrasse de la Rotonde. A la table à côté est assis un monsieur d'une quarantaine d'années. Il a une moustache noire, les ongles noirs, il est tout habillé de noir: chapeau noir, cravate noire, complet noir, imperméable noir, chaussures noires. Il a aussi une chaussette noire, mais l'autre est rouge. Il a posé une paire de lunettes noires à côté de sa tasse de café noir bien sûr. Il cligne d'un œil, puis de l'autre, puis de deux. Ce tic agace prodigieusement Mireille, qui va se lever et partir quand elle aperçoit Robert assis à la terrasse du café d'en face. Il regarde nerveusement autour de lui: à droite, à gauche; il regarde sa montre, puis il lève les yeux et tout à coup il semble découvrir qu'il y a un café en face. Il se lève comme à ressort, bondi, fait quelque pas en avant, s'arrête, revient en arrière, jette un billet sur la table, repart en courant, s'élance sur le boulevard sans regarder ni à droite ni à gauche. Un coup de frein strident, un juron retentissant mais incompréhensible. Mireille a fermé les yeux. Quand elle les ouvre, Robert est assis à côté d'elle.
R: Je suis pas en retard, non?
M: Non, non. De toute façon ça ne commence pas avant deux heures. Tu veux qu'on y aille?
R: D'accord, on y va.
M: Allons-y!
Treize heures cinquante devant le cinéma.
R: Deux places, s'il vous plaît.
M: Attends, j'ai ma carte d'étudiante, moi. Une place étudiante, s'il vous plaît.
Ouvreuse: Voilà, ça fait 64 francs. Il faut que vous attendiez un peu, ce n'est pas encore ouvert.
M: C'est dommage, que nous n'ayons pas pu venir lundi.
R: Pourquoi?
M: Parce que c'est moins cher le lundi.
Ouvreuse: Voilà, vous pouvez entrer.
M: Merci.
R: Merci.
Une ouvreuse prend leurs tickets et leur indique des places.
Ouvreuse: Ici, ça ira?
R: C'est pas un peu trop loin de l'écran?
Ouvreuse: Alors ici? Merci.
M: Tu as les tickets, elle te les a rendus?
R: Oui, mais tu as entendu comme elle a dit merci? Son ton n'était pas très aimable. Et d'ailleurs, pourquoi m'a-t-elle remercié? Je ne lui ai rien donné.
M: Justement c'est pour ça. Elle s'attendait à ce que nous lui donnions un pourboire.
R: Ah bon, il faut donner un pourboire aux ouvreuses?
M: Bah oui, c'est d'habitude.
R: Je ne savais pas, tu aurais dû me le dire. Pourquoi ne me l'as-tu pas dit? Comment veux-tu que je sache? Je ne suis pas au courant moi!
M: Oh, mais ce n'est pas bien grave!
R: Quand est-ce que ça va commencer?
M: Bientôt. Un peu de patience.
Justement les lumières s'éteignent, on passe d'abord de la publicité. Réclame pour du café...
(Pour vous Nescafé ouvre la route des grands cafés du Costa Rica au Guatemala, du Nicaragua à la Colombie, les grands cafés du monde descendus des hauts plateaux, ils ont franchi les montagnes, traversaient les vallées. Aujourd'hui les voici en Nescafé. Pur Colombie - délicat et parfumé. Pur Arabica - à la homme puissant. Pur Colombie, Pur Arabica – deux grands crus du café par Nescafé.)
Une planche à voile... (Les étoiles de mer. Bic-marine – des planches à voile pour tous).
Un dentifrice... (Gary! C'est deux dentifrices! Il y a un tube de trop. Vous m'humiliez. – Oh, vous vous égarez, ma chère. Un pour me rafraîchir l'haleine, l'autre – fluor pour mes dents. Rien de plus. – Vous êtes encore plus ringard que je n'imaginais. Très-près fluor double effet, il protège les dents et rafraîchit l'haleine en même temps. Gary, si vous tenez à moi, un seul dentifrice. D'accord? Très-près fluor double effet, il protège les dents et rafraîchit l'haleine en même temps.)
Un rasoir... (A poil! Bic, le rasoir qui se démonte pas!)
Du cognac... (Le Rémy Martin cognac fine champagne exclusivement.)
De l'eau minérale... (Il faut que j'aie les mines! Vittel vous aide à retrouver la vitalité qui est en vous.)
Une machine à écrire électronique... (... j'avais peur, en même temps elle m'attirait, je pouvais en parler à personne... Vous voulez savoir comment j'ai écrit "Mille façons d'accommoder le lapin"? Avec ma Brother EP44. ... bout du tunnel... Hmm. Ultra légère, totalement silencieuse... ma mère voulait une fille... écriture parfaite... j'étais comme paralysé... quatre mille caractères de mémoire, imprimante par micro-ordinateur... déteste les roses... Résultat - "Mille façons d'accommoder le lapin" cinq cent mille exemplaires... Ça fait du bien de parler. N'est-ce pas? Brother EP44: l'écriture électronique passe-partout.)
Et finalement des bonbons... (Mi-cho-ko – un caramel très tendre de la pie qui chante. En vente dans cette salle).
A ce moment précis les lumières se rallument et les ouvreuses deviennent vendeuses.
Vendeuse: Demandez dans la salle bonbon, esquimau.
Mademoiselle!
R: Tout ça, c'est très bien, mais ce n'est pas pour ça que je suis venu, moi. Moi, je suis venu pour voir "L'amour à l'après-midi".
M: Mais oui, ça va venir. Il faut que tu aies un peu de patience, voyons!
En effet les lumières s'éteignent.
Je croyais que ça ne commencerait jamais. Dis, il faudrait que tu m'expliques si je ne comprends pas. Promis?
Je te ferai un petit dessin!
Mais tais-toi maintenant!
Chut! Ils vont pas bientôt se taire, ces deux-là!
Ce que les gens sont mal élevés quand même!
Le film raconte l'histoire d'un monsieur d'une trentaine d'années, un jeune cadre dynamique, sympathique, marié. Il retrouve une jeune femme, un peu bohème qu'il connaissait avant son mariage et qui se met en tête de le séduire. Ils se rencontrent plusieurs fois l'après-midi. Il est tenté, mais au dernier moment il s'échappe. Il retourne à l'amour de sa femme l'après-midi, bien sûr.
R: Enfin tout cela est très moral.
M: Tout est bien qui finit bien, comme dit ma tante Georgette.